La question de Lili dans un autre post me donne l'occasion de vous parler de ce que des milliers de femmes en France et des millions par le monde ont vécu et vivent encore à cause d'un traitement donné à leur mère pendant sa grossesse.
Entre 1954 et 1977 en France (1948 à 1974 aux USA), des milliers de femmes se voient prescrire du Distilbène, molécule supposée éviter les fausses-couches.
Rapidement, on sait qu'il est non seulement totalement inefficace, mais que les bébés filles nées suite à ce traitement présentent un taux alarmant de malformations génitales et utérines. Pas grave, le labo qui distribue le produit réfute les études menées et continue à arroser le marché. Les USA retirent le Distilbène de la vente en 1974, la France continue pendant trois ans.
Ces filles grandissent et les problèmes se multiplient : cancers du col de l'utérus et du vagin, absence d'utérus, stérilité inexpliquée. Pour celles qui malgré tout arriveront à être enceintes, les malheurs continuent : FC précoces et GEU à répétition , grossesses à très haut risque avec accouchements prématurés et enfants non viables ou très gros prématurés, …
Puis ces petites filles, à leur tour, grandissent. Le traitement pris par leur grand-mère est oublié, la difficulté de leur mère pour les avoir, évacuée… tout redémarre lorsqu'à leur tour elles veulent être mamans. Elles sont elles aussi prises dans le cycle infernal causé par le Distilbène. Combien de générations faudra-t-il pour évacuer définitivement des organismes ce poison ?
Il y a moins d'études concernant les fœtus garçons exposés in utero. On a parlé de risques accrus de cancers des testicules, de malformation uro-génitales, de stérilité due à des malformations des spermatozoïdes, mais à ce jour peu d'éléments il faut le reconnaître.
Par contre, on évoque aujourd'hui des possibles répercussions psychiques (dépressions et état suicidaires).
Le
réseau DES regroupe les femmes qui ont intenté des actions auprès des tribunaux pour faire reconnaître leur souffrance et la responsabilité du labo qui a volontairement choisi le fric plutôt que la santé des femmes qui tombaient dans ses griffes. J'ai choisi de ne pas les rejoindre, je n'en ai pas eu le courage. Je salue ici toutes celles qui ont la gnaque de se battre pour nous toutes, quitte à s'exposer à la haine et au mépris de ceux qui ont fait de leur vie une vie amputée. Elles sont taxées d'hystérie, sont descendues, doivent faire face à des coups bas… mais elles s'accrochent et ont remporté plusieurs victoires. Elles m'inspirent un profond respect. J'ai voulu tourner la page, égoïstement.
Si autour de vous, des amies, des sœurs, des proches, vivent un ou plusieurs des soucis évoqués ci-dessus sans qu'une explication valable soit donnée, n'hésitez pas à leur parler du Distilbène. Il y a encore des milliers de femmes qui ne savent pas qu'elles sont victimes de ce poison. Prévenues, elles pourront consulter un gynécologue correctement informé dans ce domaine (attention, tous ne le sont pas, beaucoup ne savent quasiment rien des problèmes Distilbène) et auront plus de chance de limiter les dégâts. Sans compter que les risque de cancers sont importants et qu'il est nécessaire de surveiller particulièrement ces femmes.
Il est impératif que l'information circule.
Enfin, j'ai une pensée toute spéciale pour nos mères, "par qui tout est arrivé". Elles sont souvent dévorées de remords, de culpabilité pour l'héritage qu'elles nous laissent, et à travers nous à nos filles. Je ne crois pas qu'une seule d'entre nous rende sa mère responsable de son histoire. Pas responsables, pas coupables, victimes. Comme nous. Comme nos filles. Nous en sommes à la troisième génération. Combien d'autres ?